Paul Verlaine - Oeuvres Libres

Hombres   7/15

 

         Monte sur moi

Nl 

Monte sur moi comme une femme
Que je baiserais en gamin.
Là, c'est cela, t'es à ta main?
Tandis que mon vit t'entre, lame

Dans du beurre, du moins ainsi,
Je puis te baiser sur la bouche,
Te faire une langue farouche
Et cochonne, et si douce, aussi!

Je vois tes yeux auxquels je plonge
Les miens, jusqu'au fond de ton cœur,
D'où mon désir revient vainqueur
Dans une luxure de songe,

Je caresse le dos nerveux,
Les flancs ardents et frais, la nuque,
La double mignonne perruque
Des aisselles et les cheveux!

Ton cul à cheval sur mes cuisses
Les pénètre de son doux poids,
Pendant que s'ébat mon lourdois
Aux fins que tu te réjouisses,

Et tu te réjouis, petit,
Car voici que ta belle gourde,
Jalouse aussi d'avoir son rôle,
Vite, vite, gonfle, grandit,

Raidit. Ciel! la goutte, la perle
Avant-courrière, vient briller
Au méat rose: l'avaler,
Moi, je le dois, puisque déferle

Le mien de flux. Or, c'est mon lot
De faire tôt d'avoir aux lèvres
Ton gland chéri, tout lourd de fièvres,
Qu'il décharge en un royal flot.

Lait suprême, divin phosphore
Sentant bon la fleur d'amandier,
Où vient l'âpre soif mendier
La soif de toi qui me dévore.

Mais il va, riche et généreux,
Le don de ton adolescence,
Communiant de ton essence,
Tout mon être ivre d'être heureux.